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Accueil 9 Jeunes chevaux 9 Transformations physiologiques chez le jeune cheval de course

Dès les premières semaines et premiers mois d’entraînement, nous pouvons observer de nombreuses transformations physiologiques et musculo-squelettiques chez le jeune cheval de course. Après avoir été débourrés et pré-entraînés, les yearlings sont prêts à débuter leur entraînement afin d’améliorer leurs capacités cardiovasculaires et locomotrices. Notre équipe s’est interrogée sur les différentes transformations physiologiques et musculo-squelettiques s’opérant au cours des premiers mois d’entraînement.

Quels sont les principaux changements observables ?

Est-il possible de quantifier ces transformations afin d’assurer un suivi de l’adaptation de l’organisme des jeunes chevaux à l’entraînement ?

Les réponses physiologiques des jeunes chevaux de course à l’entraînement

Une réponse physiologique correspond à l’ensemble des réactions automatiques d’un corps (tout ou partie) à un stimulus. 

“L’objectif de l’entraîneur d’athlètes de haut niveau est de […] s’assurer qu’une performance maximale soit réalisée lors des compétitions majeures. Le but sera donc de fournir des programmes d’entraînement qui permettent une augmentation efficace de la performance.” (Meeusen et al., MSSE 2013)”. 

Ainsi, en programmant l’entraînement de leurs protégés, les entraîneurs cherchent à induire des transformations physiologiques afin d’améliorer leur performance. Voici les différentes réponses physiologiques observables après quelques mois d’entraînement.

Une respiration plus efficace

Rappelons que le système respiratoire du cheval est un paramètre inné, qui ne peut pas être amélioré avec le temps. Bien que l’entraînement n’ait pas pour vocation d’augmenter le volume des poumons, il peut apprendre au cheval à mieux souffler, et à ainsi optimiser le volume d’air inspiré et expiré au travail. La respiration est alors plus efficace et un rythme respiratoire plus élevé peut être soutenu plus longtemps.

Un système cardiovasculaire plus efficace – Amélioration de la V200 et de la VO2max

La VO2max est considérée comme l’indicateur de performance par excellence. D.Evans et R.Rose (1998) ont montré que la VO2Max est l’indicateur de capacité aérobique maximale le plus fiable. D’ailleurs, l’amélioration de la capacité de travail aérobie, c’est-à-dire de la VO2max, est considérée comme l’un des objectifs les plus importants de l’entraînement des jeunes pur-sang (Evans 1994).

    L’étude proposée par Hiraga and All (1997) stipulait qu’une augmentation de l’intensité et de la durée de l’entraînement sur une période de 8 semaines entraîne une augmentation du VO2max de 7% chez des pur-sang de 2 ans lors de leur début à l’entraînementKnight et all (1991) démontraient dans leur étude que des augmentations non négligeables de la VO2max sont observables au cours des deux premières semaines de la période d’entraînement. Ces résultats indiquent que même un exercice de faible intensité peut avoir un effet sur la fonction cardio-pulmonaire au cours des premières étapes de l’entraînement. 

    L’entraînement d’une intensité plus élevée effectué de février à avril par rapport à celui de décembre à février a entraîné une augmentation significative de la V200 tout au long de cette période. Ce résultat est cohérent avec les conclusions selon lesquelles la V200 des pur-sangs de 2 ans augmente de manière significative par un entraînement plus intense. En résumé, l’étude d’Ohmura et all (2002) a montré que la V200 augmentait au fur et à mesure que l’entraînement progressait pendant les phases initiales de l’entraînement.

    Exemple : Arion, anonymisé pour ce cas, est un cheval de 2 ans dont l’entraîneur a monitoré les débuts à l’entraînement. Les données présentées dans le tableau ci-dessous illustrent les transformations physiologiques connues par Arion lors de ses débuts d’entraînements en tant que Yearling, et lors de l’hiver de sa première saison. Le temps nécessaire à son organisme pour compenser la dette en oxygène induite par l’effort a diminué, tandis que sa V200 est passé de 46,2 à 57,6 km/h pour une FC égale à 200 BPM.

    transformations physiologiques cheval

    Données issues de la plateforme d’analyse Equimetre

    Amélioration du système sanguin 

    Au cours de l’effort, le débit sanguin est essentiellement destiné à alimenter les muscles locomoteurs en oxygène. Le volume d’éjection systolique correspond au volume de sang que le cœur éjecte à chaque battement lors de la contraction cardiaque (volume d’éjection systolique).

      L’entraînement entraîne une augmentation de la masse cardiaque du cheval de course de l’ordre de +15%. Ceci améliore sa capacité cardiaque et permet au cœur de moins se fatiguer en battant plus lentement pour un travail identique, tout en distribuant davantage d’oxygène. Ainsi, on observe une augmentation du nombre de globules rouges et une augmentation du volume de sang transporté. Cependant, il faut plusieurs années avant de constater une augmentation du diamètre des artères ou des veines.

      Les réponses musculo-squelettiques des jeunes chevaux de course à l’entraînement

      Le système musculo-squelettique est un système complexe formé des os, des muscles et des articulations (incluant des tendons et des ligaments). Les adaptations musculo-squelettiques dépendent du régime d’entraînement, c’est-à-dire de la fréquence, de l’intensité et de la durée du travail. 

      Développement musculaire

      Le muscle est le plus adaptable de tous les tissus, présentant un large éventail de réponses immédiates (exercice) et à long terme (âge, entraînement, nutrition). Des changements peuvent se produire dans les propriétés morphologiques, métaboliques et contractiles des fibres musculaires. C’est pourquoi le terme de plasticité est utilisé pour décrire l’adaptabilité du muscle squelettique

      Chez les chevaux, environ 80 % de la croissance s’est produite à 18 mois. On peut donc s’attendre à ce que le plus grand changement dans la taille de la fibre ait lieu pendant cette phase. En effet, on constate une augmentation de 30 à 70 % de la taille des fibres entre l’âge de 7 et 18 mois (Essen-Gustavsson et al., 1983). 

      L’appareil musculaire du cheval de course est composé de différentes fibres musculaires, chacune correspondant à un type d’effort spécifique. L’entraînement n’augmente bien évidemment pas le nombre de cellules musculaires, mais permet d’augmenter leur volume. En effet, un entraînement approprié permet de développer les fibres les mieux adaptées à l’effort demandé. Ces modifications musculaires peuvent être observée entre 3 à 6 mois après l’entraînement.

      Afin de quantifier le développement musculaire d’un jeune cheval suite à l’entraînement, nous pouvons nous intéresser à l’évolution de son amplitude. En effet, une augmentation de l’amplitude au détriment de la cadence pourrait témoigner du développement musculaire. Gardons cependant en tête que les pur-sang débutant leur entraînement tôt, ces transformations peuvent également être induites par la fin de leur croissance. 

      Amélioration de la capacité à produire / utiliser l’énergie

      L’augmentation du volume musculaire contribue à l’amélioration de la capacité du cheval de course à créer de l’énergie. En effet, l’augmentation du volume musculaire accroît les capacités de stockage de l’énergie dans le muscle. Ainsi, avec l’entrainement, le corps optimise les processus de création et de consommation de l’énergie. À une vitesse donnée, il a besoin de moins d’énergie et donc de moins d’oxygène, ce qui entraine une baisse de la fréquence cardiaque à cette vitesse. Un cheval entrainé va « repousser son seuil de VMA », c’est-à-dire qu’il va être capable de courir plus vite et plus longtemps sans produire d’acide lactique. Enfin, l’entraînement permet également d’améliorer la coordination des muscles entre eux.

      Développer la solidité des os

      Les os du jeune cheval de course sont soumis à de nombreuses contraintes dès les débuts de l’entraînement. C’est d’ailleurs l’une des grandes questions qui réside en terme d’intégrité : l’entraînement du cheval de course commence-t-il trop tôt ? En effet, lorsque les Yearlings débutent leur préparation, le squelette de ces derniers n’a pas encore atteint sa maturité. De nombreuses études se sont intéressées à la corrélation entre la charge d’entraînement chez le jeune cheval et le risque de blessure. Leurs conclusions sont parfois contradictoires, puisqu’une trop grande quantité de paramètres affectent leurs résultats. 

      Toutefois, il a été démontré que l’entraînement contribue au développement de la solidité et de l’épaisseur des os. Dès les débuts de l’entraînement, les os peuvent s’adapter et se remodeler selon les contraintes auxquels ils sont soumis. Cependant, il est important de trouver un équilibre entre période d’entraînement intense et phase de récupération, afin de laisser le temps nécessaire aux os de s’adapter.

      Étude menée par Crawford and all (2021) 

      L’étude menée par Crawford and all (2021) visait à déterminer les facteurs de risque de blessures musculo-squelettiques et de maladie du métacarpe dorsal. Elle présente les résultats d’une étude observationnelle prospective à grande échelle sur des chevaux de 2 ans dans le Queensland, en Australie. Des données ont été recueillies chaque semaine pendant 56 semaines auprès de 26 entraîneurs, portant sur 535 chevaux de course de 2 ans, 1 258 préparations d’entraînement et 7 512 semaines de données d’exercice. Les résultats mis en évidence sont les suivants :

       

      • Un certain niveau d’exercice à haute vitesse est nécessaire pour contribuer au développement et à l’adaptation des tendons, ligaments et os dans un soucis de prévention du risque de blessure. Cependant, au-delà d’un certain niveau d’intensité, les exercices à haute vitesse deviennent un facteur de risque pour le développement de pathologies.

         

      • Les scientifiques postulent qu’incorporer un nombre plus élevé de préparations courtes dans les premières phases de l’entraînement réduit le risque de blessure en fournissant un stimulus suffisant pour faciliter l’adaptation osseuse. Il est cependant nécessaire d’alterner avec du repos afin de minimiser la fatigue et permettre la réparation des tissus avant que les micro-dommages ne progressent.

         

      • Les tendons et les ligaments des poulains et des jeunes chevaux peuvent s’adapter à l’exercice en réponse aux forces mécaniques imposées. Cependant, la structure du tendon est mature à l’âge de 2 ans, après quoi il n’y a plus d’adaptation à l’exercice et à l’entraînement et la détérioration structurelle du tendon se produit en synergie avec l’augmentation de l’âge et de l’exercice. Il est plausible que le fait de commencer l’entraînement à un âge avancé réduise les possibilités d’adaptation des tissus. 

      Limites des ressources utilisées et disponibles concernant les adaptations physiologiques et musculo-squelettiques chez le jeune pur-sang

      Il est important de garder à l’esprit que ces transformations physiologiques et musculo-squelettiques induites par l’entraînement dépendent de nombreux paramètres, et qu’il peut être difficile de les quantifier. Les résultats des études scientifiques sur l’entraînement des chevaux sont très variables en raison de la variation de la race, de l’âge du cheval, de l’intensité, de la durée et du type d’exercice utilisé. 

      En effet, de nombreuses études se sont intéressées à ces diverses thématiques, mais selon les différents paramètres inclus (âges du cheval, méthode de pré-entraînement, temps de pré-entraînement, programme d’entraînement, etc.), certaines se contredisent, ou manquent encore d’informations. Ainsi, cet article propose simplement de lister les différentes réponses physiologiques possiblement observables, mais ne cherche absolument pas à définir de vérités ou protocoles d’entraînement.

      Conclusion

      De nombreuses études permettent d’affirmer les différents changements physiologiques subis par les yearlings et deux ans au cours de leur entraînement. L’amélioration de la V200 et de la VO2 max est la plus observable, et a été mise en évidence plusieurs fois. C’est également la plus simple à quantifier, puisqu’un système de tracking tel qu’un cardiofréquencemètre doté d’un GPS peut permettre de l’évaluer. Parmi les transformations musculo-squelettiques, l’analyse de la locomotion peut témoigner de l’évolution de la musculature des jeunes chevaux après quelques mois d’entraînement. L’adaptation musculo-squelettique est plus difficile à observer et requiert des examens cliniques poussés et coûteux. Il est important de préciser que certaines études présentent des résultats divergents, selon les paramètres employés. Les résultats présentés dans cet article sont à assimiler selon les conditions dans lesquelles ils ont été mesurés, et présentent simplement des axes de travail à investiguer.

      Mots-clés : transformations physiologiques, transformations musculaires, cheval de course, yearlings, adaptations de l’entraînement 

      Bibliographie

      Crawford, K., Finnane, A., Greer, R., Barnes, T., Phillips, C., & Woldeyohannes, S. et al. (2021). Survival Analysis of Training Methodologies and Other Risk Factors for Musculoskeletal Injury in 2-Year-Old Thoroughbred Racehorses in Queensland, Australia. Frontiers In Veterinary Science, 8. doi: 10.3389/fvets.2021.698298

      Knight, P.K., Sinha, A.K. and Rose, R.J. (1991) Effects of training intensity on maximum oxygen uptake. In: Equine Exercise Physiology 3, Eds: S.G.B. Persson, A. Lindholm and L. Jeffcott, K E E P Publications, Davis. pp 77-82. 

      HIRAGA, A., KAI, M., KUBO, K., & SUGANO, S. (1997). The Effect of Training Intensity on Cardiopulmonary Function in 2 Year-Old Thoroughbred Horses. Journal Of Equine Science, 8(3), 75-80. doi: 10.1294/jes.8.75

      Ramzan, P., & Palmer, L. (2011). Musculoskeletal injuries in Thoroughbred racehorses: A study of three large training yards in Newmarket, UK (2005–2007). The Veterinary Journal, 187(3), 325-329. doi: 10.1016/j.tvjl.2009.12.019

      Sinha, A., Ray, S., & Rose, R. (1993). Effect of constant load training on skeletal muscle histochemistry of thoroughbred horses. Research In Veterinary Science54(2), 147-159. doi: 10.1016/0034-5288(93)90050-p

      VERMEULEN, A., & EVANS, D. (2006). Measurements of fitness in Thoroughbred racehorses using field studies of heart rate and velocity with a global positioning system. Equine Veterinary Journal, 38(S36), 113-117. doi: 10.1111/j.2042-3306.2006.tb05525.x