La mort subite chez les chevaux se définit selon l’OMS comme la mort naturelle d’un individu dont le délai entre l’apparition des premiers symptômes alarmants et la mort est inférieur à 48h. La particularité d’un tel décès est que le cheval paraissait a priori en bonne santé. Ce qui la rend d’autant plus brutale est qu’elle est inexpliquée dans plus d’un cas sur deux, malgré les examens post-mortem qui sont menés.
Dans une étude publiée dans Le Nouveau Praticien Vétérinaire Équine par le Laboratoire de Pathologie Equine de Dozulé (unité spécialisée dans l’équin de l’ANSES), sur 194 cas de chevaux morts de mort subite, il ressort que 37% sont des trotteurs et 32% sont des pur-sangs. Les chevaux de course sont donc les plus touchés par ces décès brutaux. Le bien-être du cheval de course fait partie des valeurs centrales chez Arioneo, et c’est par des innovations, comme Equimetre, que toute l’équipe essaye de proposer des solutions à l’ensemble de la filière.
Les causes de la mort subite chez les chevaux
Les chevaux athlètes sont prédisposés à ce genre de décès car leur physique est éprouvé à tous les niveaux. La réalisation d’efforts intenses peut en augmenter les risques. Le cheval de course, dont les limites sont sans cesse repoussées, est particulièrement touché. On peut regrouper en trois grandes familles les causes de mort subite : les défaillances cardio-respiratoires, les chocs hémorragiques et les lésions du système nerveux central. Notons cependant que dans bien des cas, les causes des morts subites ne sont pas identifiées.
1. Les défaillances cardio-respiratoires
Les défaillances cardio-respiratoires, souvent causées par des troubles du rythme cardiaque, représentent 56% des cas chez les chevaux décédés d’une mort subite et dont les causes ont été déterminées. Il est donc important de les connaître, mais aussi, de les reconnaître. Validé pour la mesure de la fréquence cardiaque et de la variabilité cardiaque (Ter Woort et al. , 2020 Comparative Exercise Physiology), Equimetre peut proposer une aide importante pour les déceler. En effet, avec l’enregistrement de l’ECG en continu par l’Equimetre, des troubles du rythme peuvent être décelés lors des entrainements.
Les chevaux qui saignent : Hémorragie pulmonaire induite par l’exercice (HPIE)
On estime que, en fonction de leur discipline, 43 à 75% des chevaux sont atteints d’HPIE à l’issue d’un effort intense. En général, l’HPIE est le symptôme d’une pathologie sous-jacente – par exemple un cheval qui a fait une infection virale dont le cœur présente une inflammation peut développer une HPIE consécutive. Le cheval possédant un cœur volumineux et puissant, la pression sanguine est particulièrement élevée dans les vaisseaux sanguins très fins des voies poumons. Seulement 5% des chevaux souffrant d’une HPIE saignent du nez, dans la majorité des cas, le sang reste dans les poumons et n’est pas visible extérieurement, ce qui rend le diagnostic plus complexe.
Souvent causes de l’HPIE, les pathologies respiratoires peuvent se manifester lors d’un effort important associées à des difficultés respiratoires, une baisse de performance où à d’éventuels bruits respiratoires. Si ces signaux ne sont pas pris en compte à temps, le cheval peut finir être à risque plus élevé de succomber à une mort subite.
Parmi les chevaux morts d’une mort subite, une HPIE sévère est souvent mise en évidence à l’autopsie. Il faut donc garder en tête que les HPIE mortelles surviennent dans les cas où le cheval avait, a priori, une pathologie qui a fragilisé son système cardio-respiratoire.
Les maladies du coeur peuvent avoir différentes causes : inflammatoire, infectieuse,ou médicamenteuse.
Le myocarde désigne le muscle du coeur, et le terme myocardite désigne les maladies inflammatoires de ce muscle. La cardiomyopathie est une maladie chronique du coeur qui touche les ventricules et leur capacité de contraction. Les chevaux sévèrement atteints de myocardite développent différents symptômes incluant de la tachycardie (augmentation des battements par minute du coeur), de la tachypnée (augmentation de la fréquence respiratoire). Ces phénomènes se traduisent par une baisse de performance.
La tachycardie ventriculaire est une autre maladie du cœur qui les ventricules, et se manifeste par une altération à la hausse du rythme cardiaque au repos. Sur l’ECG, on constate des battements anormaux, des oscillations irrégulières de la la fréquence cardiaque du cheval, qui peut se situer entre 100 et 120 bpm rien qu’au repos, contre une fréquence cardique entre 80 et 100 pour un cheval en pleine santé.
Une utilisation suivie d’Equimetre permet non seulement de détecter les baisses de performance, mais aussi d’investiguer celles-ci grâce aux indicateurs sportifs, cardiaques et locomoteurs présentés sur la plateforme Equimetre. Un suivi longitudinal de ces paramètres permet de détecter rapidement les signes avant-coureurs de ces maladies. Une fréquence cardiaque inhabituelle à l’effort ou au repos, des contre-performances en course ou à l’entraînement seront ainsi l’occasion d’investiguer plus avant avec un vétérinaire.
Les anomalies de rythme cardiaque : la dysrythmie et la fibrillation atriale
Comme son nom l’indique, il s’agit d’une modification anormale du rythme cardiaque. Ces arythmies peuvent être particulièrement problématiques si elles se produisent à l’effort. La perfusion sanguine étant significativement perturbée, les organes ne sont plus assez irrigués et peuvent affecter la tolérance à réaliser un effort, voire même augmenter les risques de faire une syncope .
La fibrillation atriale est le trouble du rythme cardiaque pathologique le plus fréquent Les cellules de l’oreillettes se contractent de manière incoordonnée et irrégulière. Les fréquences cardiaques à l’effort peuvent atteindre des valeurs excessives, même à faible allure et d’autres arythmies potentiellement fatales peuvent apparaître.
Source : Linkedin Dr Emmanuelle van Erck
Dans sa thèse “Etiologie des morts subites chez le cheval”, Nathalie CADEC explique : “Le suivi par ECG de l’activité cardiaque au cours d’un exercice physique (course) chez des chevaux suspects de fibrillation atriale a permis de mettre en évidence le moment d’apparition de celle-ci. La fibrillation atriale, de type paroxystique [i.e. qui dure depuis moins de 7 jours], se fait dans la partie finale de la phase d’accélération (juste en fin de pic d’accélération) et induit la décélération brutale du cheval”. Tous ces éléments sont collectés et analysés par EQUIMETRE (FC, vitesse, ECG).
2. Les chocs hémorragiques
Les chocs hémorragiques interviennent dans 27% des cas de mort subite. Ils sont souvent inhérents à un traumatisme (chute, blessure, …) et les quelques cas de rupture de l’aorte sont très rares. On pense notamment au cas très médiatisé d’Hickstead, célèbre cheval de saut d’obstacle décédé sous la selle d’Eric Lamaze d’une rupture de l’aorte à Vérone lors d’une étape de la Coupe du Monde en 2011. Il est tout de même intéressant de noter que ces accidents semblent davantage toucher les étalons, généralement âgés de plus de 10 ans.
Les efforts intenses exposent bien évidemment les chevaux à ces chocs puisque la pression sanguine afin de faire fonctionner l’organisme augmente fortement, ce qui peut créer des tensions parfois extrêmes au niveau des vaisseaux sanguins qui, s’ils sont fragilisés, peuvent rompre. Les chocs hémorragiques font souvent suite à une fragilisation d’anévrismes difficiles à mettre en évidence du vivant du cheval.
3. Les lésions du système nerveux central
Ces lésions peuvent avoir plusieurs causes : traumatisme lié à une chute, un choc… et plusieurs symptômes : détresse respiratoire, tachycardie, cheval qui trébuche, … suivant la partie du système nerveux qui est atteint. Ces lésions peuvent faire suite à un traumatisme (grosses chutes sur la tête, chez les chevaux d’obstacle par exemple).
— Le Dr Emmanuelle van Erck nous en dit plus sur la mort subite chez les chevaux de course —
En quoi EQUIMETRE est-il une innovation permettant d’améliorer le bien-être des chevaux ?
EQUIMETRE est un outil qui permet de faire parler le cheval au travail. Les paramètres physiologiques seront mesurés et ceux-ci permettent de savoir si le cheval travaille dans le confort et la sécurité ou non. Quand il a des difficultés à s’entraîner, soit parce qu’il n’a pas les qualités requises, soit parce qu’il a un problème de santé sous-jacent, les paramètres seront dans le rouge et seront mis en évidence par EQUIMETRE – et ce bien plus que si l’on se fonde sur des critères purement subjectifs. Il s’agit de mettre des valeurs chiffrées sur l’impression de l’entraîneur, et voir si les valeurs anormales se répètent au fil des entraînements, auquel cas il faut s’en préoccuper.
Quels sont les signes avant-coureurs des maladies précédemment citées auxquels l’entraîneur doit prêter une attention toute particulière?
Les arythmies cardiaques provoquent un défaut de performance et affectent la récupération. Il est possible de regarder les fréquences cardiaques (FC) avec EQUIMETRE pour mettre en évidence une FC anormale et de faire revoir les données de l’électrocardiogramme collectées par EQUIMETRE à son vétérinaire pour savoir si le cheval a montré des signes d’anomalies. Les hémorragies pulmonaires se remarquent si le cheval saigne du nez, ou alors si sa fréquence cardiaque a un délai de récupération plus important après l’effort car le cheval est en déficit d’oxygène. Dans ce cas, il faut regarder s’il n’y a pas un souci au niveau pulmonaire.
Un cheval qui a une douleur, une tendinite ou une douleur d’origine osseuse par exemple, peut avoir une altération de sa manière de se déplacer, donc les paramètres de cadence et d’amplitude des foulées modifiés en même temps qu’une FC augmentée. En combinant tous les paramètres qu’EQUIMETRE permet de mesurer, il est possible de voir ce qui se profile chez le cheval : est-ce un manque de qualité ? Est-ce un problème de santé sous-jacent ?
Comment le vétérinaire peut-il déceler ces anomalies? Quels outils les vétérinaires ont-ils à leur disposition aujourd’hui?
Hors EQUIMETRE, il faut mobiliser beaucoup d’énergie car il faut regarder les chevaux au travail, ce qui signifie une présence vétérinaire, leur mettre un capteur cardiaque et un électrocardiographe. Pour l’instant, aucun système ne permet de mesurer simultanément les paramètres d’allure, la vitesse, la FC et l’ECG en même temps, sauf EQUIMETRE. Déceler un problème respiratoire nécessite souvent de mener des examens complémentaires parfois chronophages puisqu’il faut faire venir le vétérinaire durant l’entraînement. En fonction des pathologies, des endoscopies, échographies, des radiographies ou autre peuvent s’avérer nécessaires.
EQUIMETRE est-il un outil permettant la prévention des phénomènes de mort subite ? Estimez-vous qu’EQUIMETRE pourrait faire diminuer le nombre de chevaux morts de mort subite ?
Tout à fait, un cheval qui présente une arythmie cardiaque ne les développe généralement pas du jour au lendemain sans signes avant-coureurs. Ainsi, si on peut équiper ce cheval d’un EQUIMETRE à l’entraînement, on va pouvoir déceler ces signes. Des troubles du rythme pourront être mis en évidence sur son ECG, le cas échéant. Ceux-ci peuvent avoir comme conséquence la mort du cheval en course. Heureusement, ils peuvent être décelés grâce aux signaux annonciateurs visibles lors d’un entraînement intense enregistrés avec le capteur. Cela permet d’éviter de faire courir un cheval qui n’a pas la capacité de tenir la course, et risque de s’effondrer à la fin de celle-ci. L’idéal serait de sensibiliser les entraîneurs à l’importance de déceler les pathologies le plus tôt possible afin de ne pas faire courir un cheval potentiellement en danger.
L’univers des courses est régulièrement sous le feu des critiques concernant le bien-être des chevaux. Peut-on réellement associer la mort subite à des lacunes dans la prise en compte du bien-être du cheval athlète de haut niveau ?
On essaie de prendre en compte le bien-être des chevaux athlètes dans la mesure de nos moyens. Jusqu’à maintenant, la communauté vétérinaire n’a pas eu des moyens très efficaces pour suivre les chevaux à l’entrainement, et en conséquence, nous n’avons pas pu prévenir ces problèmes. En Australie, un nombre anormalement élevé de chevaux étrangers ont eu des fractures en course à cause du terrain qui serait beaucoup plus contraignant que les pistes européennes ou américaines. Ainsi, les autorités obligent maintenant à ce que les chevaux passent un scanner avant de courir dans le pays pour exclure un cheval qui aurait un risque de fracture.
Or, avec EQUIMETRE ce sont des choses que l’on peut regarder indirectement car l’on peut observer le confort du cheval à l’entraînement, grâce notamment à la combinaison de données de fréquences cardiaques et de locomotion sur différents types de terrain, jauger sa sensibilité et ainsi choisir de l’engager ou non selon ses capacités. Le bien-être est amélioré car il est possible de savoir à l’avance pourquoi le cheval n’est pas au maximum de ses capacités et d’avoir une vue d’ensemble du cheval, pour ne les faire courir qu’au meilleur de leur bien-être.
Estimez-vous que le cheval de course est un athlète suffisamment encadré, dont le bien-être est garanti ?
Préserver la santé du cheval est au cœur des préoccupations de tout entraineur. Cependant le milieu reste assez traditionnel et il faut des années d’expérience pour repérer des problèmes subtils. Nous vivons actuellement une période d’évolution excitante : nous avons maintenant la possibilité d’améliorer la prévention des problèmes grâce aux nouveaux outils mis à notre disposition. L’histoire a été la même avec les équipements destinés à augmenter la sécurité dans les voitures comme les airbags ; tout est dans l’intérêt de préserver la santé du conducteur, et ici du cheval.
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