La thermorégulation chez le cheval est l’ensemble des mécanismes qui permet de le maintenir à une température souhaitée. C’est grâce à ce phénomène que le cheval peut conserver une température autour de 37,7°C, à plus ou moins 2 degrés de variation.
La peau, les tissus cutanés, la graisse et les poils jouent un rôle majeur dans la thermorégulation du cheval. Les poils isolent majoritairement du froid, tandis que la peau disperse la chaleur. C’est pour cette raison que l’on observe un phénomène de thermogenèse (épaississement des poils) en hiver, afin d’augmenter la capacité isolante des poils du cheval. Une fois le froid passé, le cheval perd au fur et à mesure cet épais manteau pour retrouver son poil d’été.
Comment cette thermorégulation se traduit-elle chez le cheval ?
1. Réactions face au froid
On remarque 3 principales réactions du cheval face au froid :
- Les frissons : à partir de sucres et acides gras, le cheval va produire de la chaleur grâce au mécanisme de contraction de ses muscles, que l’on appelle aérobie. On distingue ce mécanisme de l’anaérobie, qui ne peut pas être tenu aussi longtemps que l’aérobie car sa production énergétique résulte de la cassure incomplète du glycogène et de l’acide lactique, responsable de la fatigue du muscle pendant un effort intense.
- La piloérection (hérissement des poils) : le cheval peut augmenter l’épaisseur de son poil jusqu’à 30% afin de de conserver plus d’air et augmenter la capacité isolante de son pelage.
- La vasoconstriction (constriction des vaisseaux sanguins) : le cheval concentre son flux sanguin vers les organes centraux de son organisme afin de réduire sa température corporelle à ses extrémités.
Schéma de la vasoconstriction et de la vasodilatation des artères
Source : psychonautwiki.org
2. Réactions face à la chaleur
Quand la chaleur revient, le cheval adapte alors les réactions de son corps afin d’éliminer ce surplus de température.
La circulation de la chaleur dans le corps du cheval peut alors se représenter sous une forme d’équation, représentant les échanges entre son enveloppe corporelle et son environnement :
GAIN = PERTES
M – T = R ± C ± K ± E
où :
M = production de chaleur métabolique
T = travail mécanique
R = échange de chaleur par rayonnement
C = échange de chaleur par convection
K = échange de chaleur par conduction
E = échange de chaleur par évaporation
On remarque ainsi que quatre composantes sont à l’origine de cet échange thermique :
- La rayonnement : mouvement de chaleur entre deux objets, sans contact physique direct, via un rayonnement électromagnétique de deux types. Il y a le rayonnement à ondes courtes, originaire du soleil, et le rayonnement à ondes longues, absorbé par le corps du cheval qui est en contact avec son environnement.
- La convection : transport de chaleur dans un fluide par le déplacement de molécules. Les particules chaudes montent et les particules froides descendent. Ce type de transfert s’effectue en continue entre le corps du cheval et l’air ambiant. Le but du pelage est d’éviter que trop de chaleur ne se perde lorsque l’air est froid, alors qu’en été le poil est fin afin de faciliter la perte de chaleur.
- La conduction : échange de chaleur lié au contact au sol. Lorsqu’il fait chaud, une vasodilatation s’opère afin de libérer la chaleur. Tandis que lorsqu’il fait froid, le sang est éloigné des extrémités afin d’éviter de perdre de la chaleur par conduction.
- L’évaporation : principal moyen par lequel les chevaux perdent de la chaleur. Lorsque la pression de vapeur à la surface de la peau atteint une valeur maximale (saturation de la transpiration de la peau), le taux de sudation dépasse le taux d’évaporation. La sueur s’écoule alors sans entraîner de refroidissement.
Les conditions météorologiques ont également un impact sur le choix du mode d’élimination de la chaleur par les chevaux. C’est la température qui détermine quel mode est le plus efficace :
- Température basse (10°C) : la température de la peau sera d’environ 25°C à 28°C (avec une différence de température avec l’air ambiant de 15°C à 18°C). La convection et le rayonnement sont suffisants pour dissiper la charge thermique imposée par un exercice léger à modéré.
- Température modérée (25°C) : 50% de la charge thermique est dissipée par rayonnement et convection, et les 50% restants par évaporation.
Cependant, lorsque la température de la peau devient égale à la température ambiante, le refroidissement par évaporation devient le seul moyen de dissipation de la chaleur.
Un effort trop intense sous une chaleur humide peut conduire à une perte de l’efficacité de l’évaporation du cheval. Ce genre de situation peut mener à des coups de sang, où, sous l’effet de la vasodilatation, le sang s’accumule dans les vaisseaux sanguins situés sous la peau et l’irrigation des organes vitaux internes devient moins efficace.
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La thermorégulation du cheval pendant l’effort
Quand un cheval est soumis à un effort, 20% des cellules musculaires sont utilisées pour le travail et les 80% restants deviennent de la chaleur. En effet, l’effort demandé au cheval fait augmenter son flux sanguin, transférant la chaleur du noyau de son corps à la surface de sa peau.
Ainsi, la température du corps du cheval peut augmenter de 1°C/minute pendant l’entraînement, et atteindre jusqu’à 45°C. Le cheval fait alors baisser la température de ses muscles vers sa peau principalement par convection. Si la vasodilatation n’est pas suffisante, c’est à ce moment-là que le cheval commence à transpirer.
Vasodilatation : augmentation de la taille du diamètre des vaisseaux par dilatation, causée par un relâchement des muscles qui composent la paroi des vaisseaux sanguins.
1. En hiver
En hiver, la tonte permet au cheval d’évaporer plus facilement cette transpiration. Un cheval faisant de l’exercice peut perdre une grande quantité d’eau via la transpiration, ce qui peut lui faire attraper froid. On considère qu’un pur-sang peut perdre jusqu’à 10 L d’eau pendant l’effort en été. Il est donc conseillé de tondre les chevaux ayant une activité physique soutenue pendant l’hiver, à condition qu’ils soient couverts par une couverture pour compenser la perte de l’isolation des poils.
2. En été
Lors de fortes chaleurs, la douche peut être utile pour refroidir son cheval après l’effort. Selon une étude du Journal of Equine Veterinary Science, la méthode la plus efficace est de doucher le cheval en continu lorsqu’il est à l’arrêt, à température ambiante pendant 2 min. Une autre méthode est également efficace, celle d’appliquer de l’eau froide (10°c) de manière intermittente sur le cheval, et d’alterner en le faisant marcher pendant 10 min.
Nous avons également vu qu’un cheval s’exerçant l’été peut être amené à perdre une grande quantité d’eau par la transpiration. Si le cheval ne s’abreuve pas suffisamment, cela peut conduire à une déshydratation. Pour prévenir ce risque, les électrolytes sont des compléments utiles pour aider le cheval à rétablir un équilibre hydrique durant l’effort.
En effet, durant la sudation le cheval perd une forte quantité de minéraux contenus dans les électrolytes, qui sont le sodium, le potassium et le chlore. Les électrolytes sont considérés comme le vecteur du transport de l’eau à travers tout le corps. Ils exercent donc une grande influence sur les fonctions musculaire et nerveuse du cheval. Il est donc important d’hydrater régulièrement un cheval à l’effort et de le complémenter par des électrolytes. Ces deux éléments doivent être fournis en même temps, car des électrolytes sans eau, et inversement, peuvent accentuer l’effet de déshydratation.
Afin de mieux comprendre le mécanisme de thermorégulation dans un contexte de récupération satisfaisante, ce schéma illustre la répartition du débit cardiaque lorsque le cheval est au repos, pendant l’exercice et en phase de récupération.
Répartition du débit cardiaque selon situation de repos, d’exercice et de récupération
Source : Equine Veterinary Education
On constate que le débit cardiaque cardiaque est fortement concentré vers les muscles pendant l’effort, à hauteur de 80%, tandis que la peau n’est qu’à hauteur de 5%. Cette tendance s’inverse alors pendant la phase de récupération, où la peau prend alors le relais afin de dissiper la chaleur produite pendant l’effort par la transpiration.
La thermorégulation chez le cheval après l’effort : quels paramètres surveiller ?
Comme nous l’avons vu précédemment sur le graphique en barres, le cheval doit se thermoréguler après avoir été soumis à un effort intense, afin d’éliminer efficacement l’excès de de chaleur. Cependant, il arrive que l’effort et les conditions météorologiques soient telles que la chaleur métabolique du cheval n’est pas dissipée dans son environnement.
En effet, les chevaux de courses ont l’un des taux de production de chaleur les plus élevés des chevaux de sport, avec une production de 1250 kJ/minute.
1. Une transpiration inhabituelle
Le premier mode de régulation de la chaleur chez le cheval est la transpiration, à elle seule elle peut dissiper jusqu’à 30% de la chaleur métabolique produite par l’exercice. Cependant, une transpiration excessive peut être annonciatrice d’une mauvaise thermorégulation du cheval. Si la sueur recouvre tout le corps, le refroidissement ne peut plus se produire et l’hyperthermie peut s’aggraver.
2. L’halètement
L’hyperventilation est également un paramètre à surveiller. Dans des conditions de courses normales, le cheval s’hyperventile naturellement afin de rééquilibrer le niveau d’oxygène dans son corps. Le cheval tient alors un même niveau de respiration que l’on peut retrouver lorsqu’il vient de terminer l’effort, à la seule différence qu’il vient baisser sa fréquence respiratoire et augmenter légèrement le volume d’air entrant dans son organisme. Cette phase ne dure que quelques minutes lorsque l’effort se déroule dans des conditions météorologiques douces.
Lorsque l’effort se produit sous une chaleur humide, le cheval peut alors adopter une respiration de type “haletante”. L’halètement du cheval ne se traduit pas par une régulation de la chaleur via sa bouche, comme on peut le retrouver chez les chats ou les chiens, mais s’exprime via son rythme de fréquence respiratoire. Cela peut donc se traduire par un rythme respiratoire supérieur à 120 respirations par minute, une dilatation des naseaux couplée à des excursions thoraciques pourtant minimes. Un mouvement de balancier peut également se produire, du fait des excursions répétées.
Ces signaux peuvent être annonciateurs d’une pathologie nommée coup de chaleur d’effort. Il est donc important que le service vétérinaire surveille attentivement les chevaux après la course afin de détecter ces signes et agir rapidement pour les refroidir.
Conclusion
Le cheval est donc doté d’une formidable capacité de régulation de sa chaleur corporelle. Il possède ainsi tout un éventail de possibilités afin de dissiper la charge thermique avant, pendant et après l’effort. Il est cependant important de surveiller ces moyens de thermorégulation afin de veiller au bien-être de ces athlètes lors de conditions météorologiques particulièrement difficiles, comme en été par exemple.
Mots clés : thermorégulation, froid, chaud, corps
Sources :
Wallsten, H., Olsson, K. and Dahlborn, K. (2012). Temperature regulation in horses during exercise and recovery in a cool environment. Acta Veterinaria Scandinavica, 54(1). Available at: https://doi.org/10.1186/1751-0147-54-42.
Brownlow, M.A. and Mizzi, J.X. (2020). Thermoregulatory capacity of the thoroughbred racehorse and its relationship to the pathogenesis of exertional heat illness. Equine Veterinary Education, 34(4), pp. 214–221. Available at: https://doi.org/10.1111/eve.13433.
Takahashi, Y. et al. (2020). A comparison of five cooling methods in hot and humid environments in thoroughbred horses. Journal of Equine Veterinary Science, 91, p. 103130. Available at: https://doi.org/10.1016/j.jevs.2020.103130.
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