Depuis 2007, la data se déploie au sein de l’industrie du sport de haut niveau : système de tracking dans tous les stades de la NBA (National Basketball Association), utilisation de capteurs durant les entraînements de rugby, analyse des paramètres clés pour les recrutements en football… À ce jour, de nombreux clubs sportifs professionnels exploitent les nouvelles technologies afin d’améliorer leur prise de décision et la performance de leurs équipes. L’utilisation des données a des bénéfices. Par exemple, les données permettent d’individualiser les entraînements en fonction des besoins identifiés de chacun. De plus, l’émergence des nouvelles technologies peut permettre de limiter les risques de blessure. Ces bénéfices sont non négligeables pour le secteur très exigeant des courses hippiques. Dans cet article, nous comparons l’entraînement entre le cheval de course et l’athlète de running afin de comprendre comment intégrer la data l’entraînement des chevaux de course.
Pourquoi le secteur des courses hippiques n’intégrerait-il donc pas davantage les données dans son quotidien ?
Au programme :
1. Quelle est la semaine type d’entraînement d’un athlète de haut niveau ?
2. Quels sont les indicateurs de performance à suivre chez ces athlètes ?
3. Le rôle de la data dans la quête de performance à haut niveau
4. Les données : une solution d’avenir pertinente pour le secteur des courses hippiques
1. Quelle est la semaine type d’entraînement d’un athlète de haut niveau ?
L’entraînement d’un athlète de running
Conscient qu’aucune vérité générale n’existe, nous avons tout de même identifié une structure d’entraînement de haut niveau similaire pour les athlètes de running : 3 semaines de travail puis une semaine moins intense, avec 3 à 4 entraînements par semaine.
Exemple – Semaine type d’un runner ayant pour objectif de courir un marathon
Type d’exercice |
Détails | |
Séance 1 |
Allure de course |
20 minutes en endurance suivies de 3 fois 2 km en vitesse de course (entrecoupés de 2 minutes de récupération) puis 10 minutes de récupération |
Séance 2 |
Travail en endurance |
45 minutes à 1 h en endurance (avec une séance de renforcement musculaire) |
Séance 3 |
Travail de VMA en fractionné |
20 minutes en endurance suivies de 8 fois 400 mètres à la VMA* (entrecoupés de récupération de 200 m) |
Séance 4 |
Travail en endurance |
1 h à 1 h 30 en endurance en variant la durée selon les semaines |
Vitesse maximale aérobie (VMA)
La VMA est l’allure à laquelle on atteint sa consommation maximale d’oxygène.
L’entraînement d’un cheval de course
Les chevaux de course sont sortis quotidiennement par lots, tôt dans la matinée. Les lots sont construits selon différents critères :
- Le caractère
- Le niveau et l’âge
- Les forces et les faiblesses à travailler ou développer
- Le type d’entraînement
Aucune méthode n’est inscrite dans le marbre et ces critères peuvent varier d’un entraîneur à l’autre. Par exemple, un entraînement de plat dure environ 1h en France contre une vingtaine de minutes en Australie. La semaine précédant une course est généralement moins intense et le dernier exercice a lieu 2 à 3 jours avant l’échéance.
Des programmes d’entraînement relativement similaires entre le cheval de course et l’athlète de running
Pour ces deux types d’athlète, la quête de performance régit leur programme d’entraînement. Celui-ci évolue selon des échéances et comprend différents types d’exercices (endurance, accélération, récupération…). Ces deux disciplines nécessitent toutes deux la pratique d’entraînements à haute intensité.
Cependant quelques différences existent entre les deux disciplines. En effet, le cheval a besoin d’être installé dans une routine afin d’être rassuré. De plus, contrairement à un athlète humain, il n’est pas en mesure de communiquer. Il est donc primordial de surveiller tous les signes synonymes de fatigue ou de blessure. Enfin, les séances intenses d’un athlète de running ne seront pas quotidiennes, car il n’a pas la nécessité de s’entraîner pour avoir une dose d’activité physique journalière acceptable.
Bien que certaines différences entre les deux disciplines subsistent, leur comparaison n’en est pas moins pertinente.
2. Quels sont les indicateurs de performance à suivre chez ces athlètes ?
Les indicateurs de performance d’un athlète de running
Grâce au développement de technologies sportives, il est désormais aisé de collecter une série de données au cours de l’entraînement chez les sportifs humains. Voici certains indicateurs intéressants à monitorer :
- La vitesse
- La fréquence cardiaque
- La VO2 max
- Le dénivelé
- La cadence
- La distance parcourue
- Les différentes zones d’effort
Exemple d’un entraînement fractionné de running enregistré sur la plateforme Garmin
L’entraînement ci-dessus se compose de 20 minutes d’échauffement, suivies de 10 fois 30 secondes d’accélération (entrecoupées d’une minute de récupération) puis se termine par 10 minutes de récupération.
On constate une accélération de la cadence atteignant les 220 pas/min en même temps que celle de la vitesse (points violets). Habituellement, les données indiquent que la cadence moyenne (visible en orange) se situe autour des 160 pas/min. Cela signifie que l’athlète utilise sa cadence et non son amplitude pour accélérer.
La fréquence cardiaque augmente au début de l’exercice (atteignant 179 bpm pendant l’effort intense) mais ne redescend pas durant les temps de récupération. Ceux-ci étant très courts, ils ne suffisent pas pour que la fréquence cardiaque retrouve son niveau initial. La phase finale de récupération est cependant efficace, puisque la fréquence cardiaque diminue. Les données précisent que presque 50 % de l’entraînement s’est déroulé en zone 4. En effet, la fréquence cardiaque n’a pas diminué durant les phases de récupération.
Les indicateurs de performance d’un cheval de course
L’arrivée de nouvelles technologies équines (telles qu’EQUIMETRE) rend désormais possible la collecte de données au cours de l’entraînement.
Voici les paramètres clés à mesurer lors d’une séance :
- La vitesse – afin de quantifier les aptitudes physiques.
- La fréquence cardiaque – afin d’évaluer le fitness.
- La cadence des foulées correspond à la fréquence de foulées atteintes en s, mesurée en foulées par seconde.
- L’amplitude des foulées correspond à la taille des foulées, m/foulée.
- Les différentes zones d’efforts – afin d’évaluer la récupération.
Exemple – Données d’une séance d’entraînement d’un cheval de course de plat en France
Cet entraînement se compose d’une vingtaine de minutes d’échauffement (pas, trot et galop de chasse). Ensuite, le cheval s’élance sur une ligne droite d’accélération au galop atteignant ici les 60 km/h.
On constate que la fréquence cardiaque diminue au fur et à mesure que la vitesse diminue. Cela indique une bonne récupération de la part de ce cheval.
Les données de cadence et d’amplitude offrent une quantification objective de la foulée du cheval. On peut ainsi observer que ce cheval possède une grande amplitude et une cadence peu élevée. À partir de cette analyse, il est possible de déterminer son profil locomoteur et sa distance de course théorique.
Enfin, les données montrent qu’un travail en zone anaérobie a été réalisé. Un cheval entraîné en zone anaérobie repousse son seuil de VMA, c’est-à-dire qu’il est capable de courir plus vite et plus longtemps sans produire d’acide lactique.
Ces données sont une aide précieuse pour l’entraîneur afin de conserver un historique dans le temps des performances de chaque cheval. Elles offrent la possibilité de “relire” l’entraînement du matin et d’y apporter un nouveau regard.
Des indicateurs de performance communs entre le cheval de course et l’athlète de running
Bien que différents de par leur nature, ces deux athlètes ont tous deux un grand intérêt dans la collecte de données.
Tableau comparatif des valeurs collectées sur ces deux entraînement
Running | Courses hippiques | |
Durée de l’entraînement | 43 minutes | 52 minutes |
Vitesse maximale atteinte | 25,9 km/h | 60 km/h |
Fréquence cardiaque maximale | 179 bpm | 210 bpm |
Amplitude maximale | N.A. | 7,2 mètres |
Cadence maximale | 221 pas/minutes (= 3,68 pas/secondes) | 2,38 foulées/secondes |
Ces deux disciplines présentent des similitudes dans l’analyse des performances de leurs athlètes. La différence principale constatée est la divergence de méthode utilisée afin d’augmenter la vitesse. L’être humain utilise majoritairement sa cadence pour augmenter sa vitesse. Augmenter l’amplitude génèrerait de plus grandes tensions et pourrait avoir un effet négatif sur les articulations en raison du changement de centre de gravité. Cette méthode d’accélération est propre à chaque cheval selon son profil locomoteur.
3. Le rôle de la data dans la quête de performance à haut niveau
La quantification des entraînements présente de nombreux avantages, tant pour le cheval de course que l’athlète de running. Tout d’abord, elle permet de mesurer et d’évaluer objectivement les progrès réalisés dans le temps, mais aussi par rapport aux autres chevaux de l’écurie.
Les données ci-dessus présentent l’amélioration de la récupération du cheval entre mars et août 2021, sur le même exercice. Cette méthode d’analyse est également réalisée en running. En effet, les athlètes disposent d’outils de comparaison similaires afin de mesurer l’évolution de leur performance.
De surcroît, la détection et la prévention des pathologies est l’un des enjeux auxquels répondent les nouvelles technologies. Un cheval peut difficilement manifester sa douleur lorsque celle-ci n’est pas d’ordre locomotrice. Les données sont un outil de détection de signes alarmants. De même, elles permettent de contrôler le niveau de fatigue afin de trouver l’équilibre entre le sous-entraînement et le surentraînement. Enfin, de futurs champions peuvent être identifiés, notamment grâce à de bonnes capacités de récupération après l’effort en début de carrière.
4. Les données : une solution d’avenir pertinente pour le secteur des courses hippiques
La quantification de l’entraînement accompagne les athlètes de haut niveau, qu’ils soient humains ou équins. Les données offrent une meilleure compréhension et écoute de l’athlète. Le tracking inauguré en octobre 2019 lors de la course du Prix de l’Arc de Triomphe témoigne du développement des nouvelles technologies au sein de la filière course. Cette tendance gagnerait donc à être suivie dans l’entraînement des chevaux de course. À ce jour, le monitoring est encore un avantage concurrentiel pour les entraîneurs de chevaux de course. Il aspire à devenir une norme telle qu’il l’est devenu dans d’autres disciplines sportives. On peut supposer que son déploiement sera, par exemple, une aide dans l’achat de jeunes chevaux ou pourra améliorer l’accessibilité des paris sur les champs de course.
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