Représentant un véritable défi de diagnostic pour les vétérinaires, la contre-performance peut s’avérer difficile à investiguer si l’entourage du cheval ne bénéficie pas de technologies fiables permettant de collecter un historique de data. En effet, il est difficile de déterminer la cause d’une contre-performance sans un suivi quasi-quotidien. Les symptômes à repérer sont le plus souvent subcliniques, c’est-à-dire qu’ils sont difficilement détectables au repos et à l’effort. La détection de chevaux contre-performants au sein de la filière course est un véritable enjeu pour les institutions. Effectuer un travail de prévention et de détection pourrait en effet permettre d’éviter les accidents graves sur la piste d’entraînement ou le jour J à l’hippodrome.
Afin de détecter les éléments influençant la performance du cheval athlète, il est intéressant d’analyser son évolution au cours d’un exercice car des choses ne se produisant pas au repos peuvent apparaître.
Dans une série de deux articles, nous analyserons deux cas de contre-performance rencontrés par le Dr Emmanuelle van Erck au cours de sa pratique vétérinaire.
Investiguer la contre-performance chez les chevaux de course avec des données tangibles
Le premier cas traite d’un jeune hongre de 2 ans ayant eu une première course prometteuse. Cependant, au fur et à mesure du temps, l’entraîneur réalise qu’il démontre moins de progrès que les autres chevaux de son âge. La première chose à faire afin d’investiguer les raisons de cette diminution de la performance est de comparer les données de ce cheval à celles de la moyenne des chevaux de l’écurie.
Premièrement, on remarque qu’il n’existe pas de différence apparente au niveau de la vitesse et des temps d’entraînement entre le cheval pathologique et les autres chevaux de l’écurie. Cependant, lorsque l’on s’intéresse aux fréquences cardiaques et à la récupération, on remarque qu’après 15 minutes de récupération, la fréquence cardiaque reste anormalement élevée chez le cheval pathologique.
Afin d’approfondir l’analyse de cette anomalie, il est important de regarder plus précisément l’entraînement.
En superposant la courbe de vitesse et de fréquence cardiaque, on observe que la fréquence cardiaque reste anormalement élevée : lorsque le cheval décélère, la fréquence cardiaque reste élevée. Elle devrait diminuer dans le même temps que l’effort. Cette analyse confirme la première observation effectuée lors de la comparaison avec les autres chevaux de l’écurie.
Ce type de cas est propre aux chevaux en hypoxémie. Cela signifie que le cheval a une dette en oxygène induite par l’effort très élevé. Pour compenser cette dette, la fréquence cardiaque reste élevée au-delà de la phase de décélération.
Afin de détecter quand est-ce que le problème est survenu, il est nécessaire d’analyser l’évolution des données dans le temps. Ces dernières doivent provenir d’exercices d’intensité égale (les fréquences cardiaques maximales et vitesses sont situées au même niveau).
La fréquence cardiaque après 15 minutes (témoin de la récupération) augmente à partir du 11 mai, et reste élevée durant quelques semaines. Ainsi, à partir d’un certain temps, le cheval a rencontré des difficultés à récupérer. L’analyse de l’ECG (collecté automatiquement à chaque entraînement avec EQUIMETRE) permet de déterminer les raisons de cette augmentation.
L’ECG est un excellent moyen de détection d’arythmies : il peut souligner un rythme cardiaque anormal ou un battement prématuré. L’ECG du cheval pathologique contient des arythmies (flèches rouges) et est donc anormal puisqu’il présente de extrasystoles régulièrement au cours de l’exercice. Le vétérinaire doit alors investiguer ce cas afin de déterminer la cause des arythmies. Elles peuvent être la résultante secondaire de plusieurs affections à l’origine du déficit en oxygène.
À l’osculation après l’effort, le cheval présentait un léger souffle qui a été investigué à l’aide une échographie cardiaque. Cela a permis de détecter une insuffisance valvulaire majeure qui déclenche les extrasystoles observables à l’ECG.
Ainsi, ce cheval présente malheureusement un problème cardiaque primaire et ne peut pas être laissé à l’entraînement en l’état. Dans le meilleur des cas, il présenterait une stagnation de la progression à l’entraînement et une perte de performance et dans le pire des cas, il pourrait s’effondrer en course. Ce cheval est donc à réformer.
Ce cas est un excellent exemple de communication entre entraîneur et vétérinaire. Ces derniers disposaient de données objectives et étendues dans le temps qui ont permis de détecter la cause du problème sous-jacent afin de prendre la meilleure décision pour le bien-être du cheval.
La technologie au service de la performance et du bien-être de l’athlète équin
Le rôle des nouvelles technologies aujourd’hui est de faire le lien entre vétérinaire et entraîneurs. Il est impossible pour le vétérinaire d’être présent tous les jours à l’entraînement. Ainsi, grâce au monitoring, ce dernier peut effectuer un travail de prévention à distance en suivant les indicateurs de ses patients depuis son ordinateur. Si l’entraîneur détecte un signe alarmant, il peut en parler à son vétérinaire et lui montrer l’historique des données. Ces systèmes connectés permettent d’améliorer le suivi des chevaux ainsi que la connexion entre les différents membres de leur entourage.
Les athlètes humains bénéficient tous de ces technologies pour les protéger au quotidien tout en maximisant leurs chances de performer, le monde hippique a à son tour l’occasion de protéger ses athlètes !
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