Plusieurs éléments influent sur les stratégies locomotrices. En effet, la locomotion du cheval est fortement influencée par le terrain sur lequel il se déplace. En effet, le cheval de course ne se déplace pas de la même manière sur un sol profond que dans une pente. La qualité du terrain ainsi que le type de piste sont des facteurs déterminants de la stratégie de vitesse en course. Cette article évalue l’impact des virages, de la pente ainsi que de la qualité du sol sur l’amplitude et la cadence du cheval.
1. Stratégies locomotrices : les virages
Le travail en ligne droite et le travail en courbe sont deux exercices distincts. Dans une courbe, l’effort demandé au cheval est plus important que lors d’une ligne droite. En effet, tout comme les voitures, les chevaux sont sujets à une force centrifuge les tirant vers l’extérieur du virage. Pour rester à l’intérieur du virage et ne pas perdre de temps, le cheval doit alors fournir un effort plus intense. Afin de rétablir son équilibre naturel, le cheval adapte sa locomotion, expliquant ainsi pourquoi l’effort est de nature plus intense.
Pourquoi les courbes impliquent-elles une modification de la locomotion ? Comment l’amplitude et la cadence sont-elles modifiées ? L’entraînement en courbe doit-il être favorisé ?
Rétablissement de l’équilibre naturel
Lors des virages, la force centrifuge perturbe l’équilibre des chevaux. Afin de ne pas glisser, notamment sur terrain gras, ces derniers doivent alors modifier leur locomotion. L’antérieur intérieur est soumis à une pression plus élevée que l’antérieur extérieur. Les muscles du côté intérieur du cheval sont grandement sollicités afin que le cheval ne s’effondre pas (Cogger et al., 2006).
Réduction de la vitesse
La vitesse en course tend à diminuer lors des virages (Rooney, 1983). En effet, les chevaux devant fournir un effort plus intense sont contraints de ralentir afin de tenir sur la durée. L’amplitude diminue fortement tandis que la baisse de cadence est beaucoup plus légère. Les muscles étant soumis à un effort plus important, ils ne sont plus assez puissants pour maintenir une amplitude égale à celle en ligne droite.
Prenons un exemple concret survenu en course de trot sur 1950m. Quelle a été la variation de la cadence et de l’amplitude ?
Dans le graphique suivant, la moyenne de 21 courses a été réalisée sur des sections de 200m. Pour chaque virage, on observe une diminution de l’amplitude, notamment dans le virage le plus serré. La cadence subit aussi ces variations mais dans une moindre mesure. Il est aussi notable qu’elle augmente avant l’amplitude à qui il faut plus de temps pour retrouver sa valeur nominale.
L’introduction du travail des virages à l’entraînement apparaît alors pertinent. Cela permet de développer une musculature spécifique et d’entraîner le cheval à adapter sa locomotion afin d’améliorer sa motricité. Ceci est d’autant plus important pour les trotteurs. En effet, les jeunes chevaux doivent apprendre à gérer le mouvement de leurs membres afin que ces derniers ne se touchent pas (cela risquerait de les mettre à la faute).
2. Stratégies locomotrices : la pente
Que ce soit à l’hippodrome ou sur les pistes d’entraînement, il existe toujours un dénivelé plus ou moins marqué. Pourquoi le cheval adapte-t-il sa locomotion dans les pentes ? Comment cette modification est-elle perçue dans les données ? L’entraînement en pente est-il bénéfique pour les chevaux ?
Qu’elles soient ascendantes ou descendantes, les pentes induisent nécessairement une modification du déplacement.
Pente ascendante
Dans les montées, l’effort demandé au cheval est plus important que sur le plat : il doit vaincre la gravité qui tend à empêcher sa progression. Plus la pente est raide plus cet effort sera intense. Les pentes induisent des modifications de la locomotion. L’amplitude diminue fortement en raison du surcroît de force nécessaire à parcourir la même distance que sur le plat. Si le cheval dépense une énergie égale, son amplitude sera moindre en montée que sur le plat. La cadence diminue également. En revanche, si le cheval doit accélérer en montée, il augmente uniquement sa cadence (son amplitude elle ne varie pas).
L’entraînement en pente a plusieurs bénéfices. Les montées permettent de faire travailler le cheval sur un effort maximal sans atteindre sa vitesse maximale. En raison de la force nécessaire à la progression, il permet de développer la puissance ainsi que la musculature des chevaux.
Pente descendante
À l’inverse, dans les descentes, le principal enjeu est de maîtriser l’équilibre. Ceci est rendu difficile car dans un souci d’efficacité, les chevaux de course font peser beaucoup de poids sur leur avant-main qui se retrouve alors très surchargée durant les descentes.
L’entraînement en descente n’est pas nécessairement recommandé car aucune démonstration n’a été faite quant à l’amélioration possible des chevaux sur ce type de travail. Certains scientifiques avancent l’hypothèse que de tels entraînements pourraient mener à des blessures.
Dans l’exemple suivant, l’exercice mené commence en pente descendante, continue sur un faux plat avant de terminer sur une pente ascendante. Il a été demandé aux chevaux d’accélérer dans la montée. On peut alors remarquer que les chevaux atteignent leur amplitude maximum dans le faux plat, à la fin de la descente. Cependant, ils sont contraints de la réduire lors de la montée en raison de l’effort demandé aux muscles. Cet exemple permet de mettre en avant le fait qu’aucun des deux chevaux n’est capable de maintenir son amplitude dans une montée. Concernant la cadence, s’ils sont tous deux en mesure de l’augmenter pour accélérer dans la montée, la descente peut se révéler compliquée à négocier. Les données montrent que le cheval numéro 1 diminue sa cadence afin de rétablir son équilibre.
Il est possible d’expliquer que l’amplitude continue de baisser bien que la pente soit plus douce (passage de 8,6 à 6,4%) par un « effet de fatigue » : les muscles mis à rude épreuve durant le passage à 8% ont besoin d’un peu plus de temps avant d’être capables de fonctionner normalement.
3. Stratégies locomotrices : le terrain
Les virages et les pentes sont des facteurs influençant la vitesse et la locomotion des chevaux de course. Il faut cependant ajouter à ces paramètres l’influence du sol sur lequel progresse le cheval. En Europe les chevaux courent principalement sur le gazon ou sur des pistes en synthétique. Ils peuvent également progresser sur du sable lors des entraînements. Quelles sont les caractéristiques des différentes pistes ? Pourquoi le cheval modifie-t-il sa locomotion selon le terrain ? Comment l’amplitude et la cadence varient-elles selon le type de sol ?
Les pistes en herbe sont très dépendantes de la météo. En effet, la température et les précipitations influencent fortement leur qualité. Lorsque les circonstances sont optimales, elles permettent un bon amortissement des foulées, un temps de pose court et des pointes de vitesse remarquables. Les pistes en synthétique permettent d’être relativement indépendant de la météo bien que de légères variations existent. En revanche, leur qualité est loin d’égaler celle des pistes naturelles.
Sur les pistes très dures, la propulsion du cheval est excellente avec un minimum de perte d’énergie. Les foulées possèdent une grande amplitude et l’augmentation de la cadence est simplifiée. Néanmoins les pistes trop dures ne sont pas toujours celles qui permettent d’obtenir les vitesses les plus importantes. En effet, les chocs ne sont pas amortis et cela peut être douloureux pour les chevaux. À l’inverse, la progression sur une piste profonde est très compliquée. La vitesse est alors diminuée car les chevaux réduisent leur cadence et leur amplitude.
Le type de sol sur lequel le cheval évolue influence donc non seulement sa vitesse mais aussi sa locomotion. De manière générale, à vitesse constante, plus un sol est dur plus les foulées vont être longues et au contraire, plus le sol est profond plus la durée d’une foulée est courte.
Ce tableau présente la cadence et l’amplitude moyenne des courses de galop en fonction de la profondeur de pistes en herbe. L’amplitude et la cadence sont donc corrélées à la qualité de la piste. Cadence comme amplitude diminuent quand la profondeur augmente : les chevaux courent moins vite dans la boue que sur un terrain très dur (source : base de données des courses anglaises)
Ici, nous retrouvons les courses sur herbe au galop. En fonction de l’état du terrain, sont indiquées la cadence et l’amplitude moyenne des chevaux ayant fini dans les 3 premiers à 60km/h. Cela permet donc de comparer la locomotion à même vitesse ce qui nous donne des indications dont les chevaux se déplacent préférentiellement sur ces terrains. Dans les terrains plus profonds, les chevaux ont tendance à faire des foulées de durée plus courte au détriment de leur longueur.
Ceci leur permet de limiter les risques de glissade ainsi que les efforts nécessaires à s’arracher de terre avant le temps de suspension. Au contraire, dans les terrains plus durs, les chevaux effectuent des foulées plus amples. (Source : base de données des courses anglaises)
Bibliographie
Cogger, N., Perkins, N., Hodgson, D., Reid, S. and Evans, D., 2006. Risk factors for musculoskeletal injuries in 2-year-old Thoroughbred racehorses. Preventive Veterinary Telemedecine, 74, pp.36-43.
Rooney, J., 1983. Impulse and breakdown on straights and turns in racehorses. Journal of Equine Veterinary Science, 3(4), pp.137-139.
Mots clés : stratégies locomotrices, parcours de course, influence de la piste, hippodrome, cadence, amplitude, amplitude à 60km/h, cadence à 60 km/h, stratégies locomotrices